Les grandes figures
Henri Hubert
Une riche formation intellectuelle
Reçu en 1892 au concours de l'École normale supérieure, Henri Hubert s'initie aux langues sémitiques. A l'École pratique des Hautes Études, il se consacre à l'histoire des religions. Son intérêt pour la nature des phénomènes religieux le rapproche de Marcel Mauss, "le père de l'ethnographie française", qui fréquente les mêmes cours de langues orientales, l'introduit dans le milieu des sociologues et l'incite à collaborer à la revue l'Année sociologique.
Sa curiosité d'esprit, sa formation et la fréquentation de personnalités scientifiques de renom lui permettent de gagner une solide compétence en géographie et en histoire des civilisations assyro-babylonienne, hébraïque, gréco-romaine, celtique et germanique.
Henri Hubert au Musée des Antiquités nationales
Entré en 1898 au musée des Antiquités nationales comme attaché libre puis promu conservateur-adjoint, Hubert réorganise de nombreuses salles : celles de l'âge du bronze, de l'époque de Hallstatt (âge du fer), des métiers et de la poterie gallo-romaine, ainsi que les salles dédiées aux collections Piette, Moreau, d'Acy, de Baye et Morgan.
La création d'une salle d'archéologie comparée
En 1910, le directeur du musée, Salomon Reinach, lui confie la réalisation d'une nouvelle présentation de la salle de Mars (salle d'archéologie comparée et ancienne salle de bal du château) qui, depuis l'ouverture du musée en 1867, servait de "magasin général et de lieu d'exposition pour les monuments trouvés hors de Gaule, présentant de l'intérêt à titre d'éléments de comparaison".
Aidé par Marcel Mauss, il va concevoir cette salle pour illustrer "l'histoire ethnographique de l'Europe et de l'humanité" depuis les origines jusqu'au tout début du Moyen Âge.
Hubert, une approche sociologique de l'archéologie
Hubert pense que seule une vision d’ensemble des cultures humaines dans toute leur étendue temporelle et spatiale amène à une juste compréhension de la formation et de l’évolution des sociétés humaines. Essayant de classer ces sociétés selon leur succession chronologique et leur niveau technique, il organise la présentation selon deux axes principaux qui se recoupent :
- l'axe longitudinal de la salle montre les étapes techniques selon leur ordre d'apparition supposé (du Paléolithique au haut Moyen Âge : taille de la pierre, fabrication de la céramique, maîtrise de la métallurgie, fabrication d'objets en matériaux organiques...)
- plusieurs axes transversaux permettent d'établir des comparaisons entre continents ou zones géographiques plus ou moins éloignés pour montrer la permanence ou la variabilité des milieux et des techniques utilisés par les groupes humains, par exemple au Proche-Orient, en Égypte, en Europe, dans le Caucase ou en Amérique...
Un réseau de spécialistes
Au cours de son travail, Hubert est en relation avec un grand nombre de spécialistes et d'hommes de terrain qui enrichissent régulièrement les collections du MAN. Il réussit à faire transférer au musée la collection océanienne de l'ancien musée de Marine du Louvre (1907-1911) qui, avec la collection donnée par Jacques de Morgan en 1910, constituera le noyau primordial de la salle de comparaison.
D’une santé précaire, Henri Hubert meurt subitement en 1927 avant d'avoir achevé ses projets de réorganisation et la publication de ses deux gros ouvrages consacrés aux Celtes puis aux Germains.
Pour aller plus loin :
- Notice Henri Hubert sur le site de l'INHA
- Étude critique de l'article de Marcel Mauss et de Henri Hubert "Esquisse d'une théorie de la magie", à partir des manuscrits conservés au musée d'Archéologie nationale
Bibliographie :
- GRAN-AYMERICH E., Naissance de l’archéologie moderne 1798-1945, Paris, CNRS Editions, 1998.
- GRAN-AYMERICH E., Dictionnaire biographique d’archéologie 1798-1945, Paris, CNRS Editions, 2001.
- Henri Hubert [Nécrologie], in Bulletin de la Société préhistorique française, t. 24, n° 6, 1927, p. 162-163.