Poignard en bronze, Djönu (Azerbaïdjan)

Collection d'Archéologie comparée des 5 continents

Poignard en bronze

 

 

Poignard en bronze, Djölu

 

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Le poignard actuellement exposé appartient à la collection archéologique rapportée par Jacques de Morgan lors de son voyage d’exploration dans le sud du Caucase. En effet entre 1889 et 1892, fort d'une expérience précédente en Arménie, l’explorateur voyage en Asie occidentale grâce à une indemnité du ministère de l’Instruction publique. À l’origine, Morgan prévoyait d’alterner ses recherches en Perse et en Russie. Faute d’autorisation pour traverser le territoire turc, il modifie son itinéraire pour parcourir des régions peu connues de la Perse telles que le Ghilân, le Mazanderân et l’Azerbaïdjân persans.

Du côté russe, l’explorateur subit des tracasseries des autorités du Lenkorân (actuel Azerbaïdjan) qui lui opposent un décret impérial réservant aux savants russes le droit d’effectuer des fouilles archéologiques. Malgré ces difficultés, en avril 1890 Morgan parcourt le Lenkorân (ou Talyche russe à cette époque) avec sa femme et y fouille 191 sépultures jusqu’en juin. Les résultats sont rapidement publiés entre 1894 et 1905 et l’archéologue reçoit dès 1892 le prix Léon Dewez décerné par la Société de Géographie. Les découvertes archéologiques du Lenkorân sont exposées au musée Guimet (Paris) de l’automne 1892 au mois de juin 1893, avant d’être données au musée des Antiquités nationales.

 

 

tombesdjonu.jpgCe poignard a été trouvé dans l’un des dolmens de la nécropole supérieure de Djönü, à 1800 m d’altitude environ. Au moment de sa découverte, de nombreux objets et des ossements humains étaient enchevêtrés au sein d’une sépulture qui ne comportait aucun objet en fer. D’après les observations de l’archéologue, le monument était resté aux deux tiers intact et abritait sept squelettes accompagnés de dix-huit vases en terre cuite, cinq pointes de lance en bronze, deux bracelets, un couteau, de nombreuses pointes de flèche en bronze, en obsidienne, en silex, en cornaline et en quartz, ainsi que de nombreuses perles de pâte de verre, de cornaline et de terre cuite et des fusaïoles (poids de fuseau pour filer la laine).

L’objet présente une lame triangulaire plate et biseautée à bords concaves et une garde rectangulaire soulignée de trois nervures horizontales. La fusée (« tige » verticale) de la poignée, de section circulaire, comprend cinq anneaux en bourrelet ; à la base d’une des faces, elle présente aussi une perforation avec un rivet servant à consolider la fixation de la poignée dans laquelle la lame a été enchâssée. L’élément le plus spectaculaire est le large pommeau constitué d’une épaisse lame en arc de cercle, bien proportionnée par rapport à la grandeur totale de l’arme. Il est possible que les rebords situés en partie inférieure de l’arc aient servi de point d’appui à un élément taillé dans de la pierre ou dans un matériau organique, emboîté à l’origine et disparu depuis, à la manière d’autres poignards de même provenance géographique ayant conservé de tels éléments d’incrustation.

Les spécialistes rattachent ce type de poignard à la famille des productions métallurgiques bien identifiées en Mésopotamie dès l’époque de la première dynastie d’Ur (première moitié du IIIe millénaire avant notre ère) et en Asie mineure (Alaça Hüyük, Turquie, fin du IIIe millénaire). En effet, malgré des différences morphologiques et techniques et la dissémination d’un faible nombre de pièces sur une vaste aire géographique, certaines similitudes esthétiques et morphologiques sont à noter. Le type de pommeau en croissant développé est ensuite adopté du Bronze moyen au Bronze récent, dans l’ensemble du Levant et jusqu’en Egypte.

 

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En raison des objets associés et par comparaison avec d’autres fabrications analogues du nord et du nord-ouest de l’Iran à la fin du IIe millénaire avant notre ère, l’exemplaire du MAN est daté de la période du Bronze récent III, vers 1350-1200 avant notre ère. Il ne fait guère de doute qu’en raison de la taille inhabituelle de son pommeau, cette arme n’ait eu qu’un usage cérémoniel et symbolique. Comme l’ensemble du mobilier archéologique
provenant des recherches de Jacques de Morgan dans le nord-ouest de l’Iran et le sud-est de l’Azerbaïdjan et conservés aujourd’hui au MAN, cet objet est réétudié dans le cadre du programme NABIALLA (cf encadré) et a été sélectionné pour de nouvelles analyses de composition métallographique effectuées par le Centre de Recherche et de Restauration des Musées de France.

 

 

 

Sur les pas de Jacques de Morgan

 

Un musée dans un château
11h, 14h ou 15h - 1h30 - A partir de 13 ans
Objet du mois
Un chapeau d'essieu recouvert de tissus

Objet du mois d'avril 2024