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Casse-tête huron
© Loïc Hamon

UNE PERSPECTIVE ETHNOARCHÉOLOGIE AVANT L'HEURE

La provenance exacte de cette massue est inconnue. Son inscription dans l’inventaire du milieu du XIXe siècle du musée de Marine du Louvre est la confirmation d’une origine ancienne que des spécialistes font remonter au XVIIIe siècle. Publié en 1917 dans le catalogue du musée rédigé par Salomon Reinach, l’objet est intégré à la présentation muséographique des vitrines consacrées à la culture matérielle américaine. Dans une perspective « d’ethnoarchéologie » avant la lettre, il permettait d’évoquer l’équipement traditionnel des groupes autochtones d’Amérique du Nord, de montrer la variété des objets en matériaux organiques souvent détruits en contexte archéologique et d’illustrer l’adaptation de la forme de ces objets à leur usage.

UN OBJET AU DÉCOR ÉLABORÉ

Fabriquée dans le bois extrêmement dur et dense d’un nœud de souche de hêtre ou d’érable, cette massue a été sculptée d’un seul bloc. Le sculpteur a utilisé la déformation naturelle de la pièce de bois pour tailler le long manche et la sphère ovoïde massive. Une sorte de lézard, dont la tête a été cassée, est soigneusement exécuté en haut-relief au sommet de la courbure du manche, marquant le raccord avec l’extrémité sphérique de l’objet. De minuscules perles de verre blanches incrustées dans le bois soulignent l’arête du manche et ornent la boule sous la forme de motifs en croix. Sur l’une des faces du manche ont été incisés des signes ou une sorte d’inscription tandis que quatre personnages filiformes et sans tête sont schématiquement gravés sur le dessus du manche. Les dessins incisés le long du manche représentent les hauts faits du guerrier. Les figures humaines schématiques sans tête symbolisent les ennemis tués et ceux représentés avec une tête, les prisonniers. Parfois, une série de lignes verticales indique le nombre de combats engagés. Certains casse-têtes offrent un décor plus élaboré, en relation avec la compréhension de l’univers et des forces qui y sont à l’œuvre, propre aux hommes de ces premières nations.

UNE "CARTE DE VISITE"

Ce type d’objet était l’une des armes emblématiques des groupes de la famille iroquoienne habitant les forêts (Woodlands) du nord-est des États-Unis et du sud du Canada tels que les Hurons. Ce nom leur a été attribué par les colons français débarqués au Canada au XVIIe siècle et sans doute un peu effrayés par leur apparence et leur coiffure qui évoquait une hure de sanglier. Le casse-tête était l’arme la plus utilisée pour le combat au corps à corps dans les forêts du nord-est américain aux XVIIe et XVIIIe siècles. Plutôt que lancé à distance, il était utilisé pour frapper directement et fracasser le crâne ou la mâchoire des ennemis Selon les récits de témoins contemporains, les guerriers indiens pouvaient utiliser leurs massues à décor gravé comme une sorte de « carte de visite » : ils abandonnaient le casse-tête auprès du mort, afin que leurs ennemis sachent qui avait tué et à quelle nation il appartenait.

BIBLIOGRAPHIE

Christine Lorre, « Un témoin des premières nations de la région des Grands Lacs au Canada », Archéologia, 2022, p. 22 – 23
 

LIENS UTILES

Pour en savoir plus sur les Wendats (Hurons)

Pour en voir plus sur les Wendats

Les collections du Musée huron-wendat

Pour en savoir plus sur les différents groupes natifs américains

 

Fiche rédigée par Christine Lorre et Audrey Lopes