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L'archéologie comparée
Statuette

Statuette d’hippopotame en terre cuite. Pâte végétale

Appartenant à la collection prédynastique égyptienne donnée au MAN par Jacques de Morgan, la statuette d’hippopotame découverte dans les environs de Toukh (Nagada, Haute-Egypte) mérite d’être reconsidérée à la lumière de récentes découvertes.

JACQUES DE MORGAN ET LA PRÉHISTOIRE ÉGYPTIENNE

Jacques de Morgan est un archéologue français de la seconde moitié du XIXe siècle et du début du XXe siècle ayant exploré de nombreuses régions, depuis le Caucase jusqu’à la Perse en passant par l’Égypte. Il est en effet nommé directeur du Service des antiquités de l’Égypte alors qu’il n’est pas égyptologue, à la suite de ses fructueuses explorations en Arménie et en Perse.

Il réorganise le service, ouvre de nombreuses salles dans le musée de Gizeh qu’il rénove. En collaboration avec l’École française du Caire, il rédige le Catalogue des monuments et inscriptions de l’Egypte ancienne. Au cours de ses travaux, il fait des découvertes phares : le scribe accroupi (Ve dynastie, musée égyptien du Caire), les mastabas de Kagemni et de Mérérouka (VIe dynastie) et les tombes du roi Hor et des princesses Méryt et Khnoumit (XIIIe dynastie) à proximité des pyramides de Dahchour. Il entreprend des fouilles afin de mieux comprendre la préhistoire égyptienne. Recoupant les résultats des travaux de ses contemporains, notamment ceux de W.M.F. Petrie et d’É. Amélineau, avec ses propres observations stratigraphiques de la vallée du Nil, il identifie formellement des structures funéraires prédynastiques dans plusieurs sites de Haute-Egypte.

C’est dans ce contexte que Jacques de Morgan a publié cet objet, après l’avoir acheté à un marchand de Qeneh (actuelle Qena, Haute-Egypte) comme provenant de Toukh, importante nécropole du site de Nagada.

UN HIPPOPOTAME PAS COMME LES AUTRES

L’époque prédynastique a fourni une documentation iconographique abondante et variée à propos de cet animal. Les tombes de l’époque de Nagada I (3900-3650 av. notre ère environ) et du début de Nagada II ( 3650-3300 av. notre ère environ) ont livré un grand nombre de vases de type White Cross-lined (à engobe rouge et décor de croisillons peints en blanc) ornés d’un ou plusieurs de ces animaux parmi des végétaux stylisés ou de scènes de chasse au harpon. Ces dernières symbolisent la nécessaire maîtrise des forces chaotiques, incarnées par l’hippopotame.

La statuette d’hippopotame du MAN appartient à une série plus rare en raison de sa grande taille. Fabriquée en limon du Nil avec un dégraissant végétal, elle offre une version très reconnaissable, bien que stylisée, de l’animal : les pattes sont épaisses et la tête présente à la fois le large mufle si caractéristique avec des naseaux en surépaisseur, des yeux proéminents et de petites oreilles dont l’une est brisée. Au lieu d’une forme rebondie, le corps ressemble à une sorte de tablette horizontale épaisse dont la surface semble avoir été soigneusement régularisée.

UNE DÉCOUVERTE QUI REBAT LES CARTES

Longtemps sans comparaison directe, cette statuette a suscité des doutes sur son authenticité mais la découverte en 2018 à Hierakonpolis des vestiges d’une étonnante statue incite à la réexaminer.

Entièrement fabriquée dans du limon du Nil mêlé à des inclusions de paille et des fragments minéraux, cette statue très fragmentée, est exceptionnelle par sa taille, estimée à 1,50 m ou 2 m, qui pourrait correspondre à celle d’un jeune hippopotame. Cette création a demandé une remarquable maîtrise technique dont il est encore difficile de préciser la datation, puisque des sculptures analogues sont connues tout au long de l’époque prédynastique et jusqu’aux premières dynasties. La taille et le mode de fabrication de cette statue peuvent être rapprochés de ceux d’une tête d’hippopotame de 50 cm de long environ, en terre cuite grossière, trouvée à Qustul en Nubie (Egypte), en association avec des tombes datées de l’époque de Naqada III. La zone de la nécropole HK6 de Hierakonpolis ayant livré les restes d’une installation à usage rituel à l’époque prédynastique, remaniée au Naqada III, il est possible que cette grande statue ait pu être exposée sur une terrasse surélevée, tel un gardien du monde des morts.

Vu sa qualité d’exécution, son état de conservation et ses proportions, la statuette du MAN pourrait être rattachée à cette série d’objets hors du commun et avoir rempli un rôle analogue au sein de l’une des tombes de la nécropole de Toukh (Nagada).

BIBLIOGRAPHIE

Catalogue sommaire illustré des collections du musée des antiquités nationales de Saint-Germain-en-Laye : Archéologie comparée, Tome 1, Afrique, Europe occidentale et centrale, Paris : Réunion des musées nationaux, 1983, p.143

Droux, Xavier, Hierakonpolis Hippo Round Up !, Nekhen News, 27, 2015, p.8-9, disponible en ligne

Friedman, Renée, The Hippo Next Door : Further Discoveries Around Tomb 111, Nekhen News, 30, 2018, p. 13-14, disponible en ligne

LIENS UTILES

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Vers le portrait de Jacques de Morgan

 

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