Lur du Danemark
Découvert par un fermier danois dans un marécage, cet objet courbe en alliage cuivreux est d’abord conservé dans les collections royales du roi Frederik VII du Danemark avant que ce dernier ne l’offre à l’empereur Napoléon III, qui projetait alors de créer un musée gallo-romain à Saint-Germain-en-Laye.
UN PARCOURS MOUVEMENTE
Cet objet connaît un parcours mouvementé avant d’entrer au musée d’Archéologie nationale. Découvert en compagnie d’un autre exemplaire à Blidstrup, au Danemark, il est donné au roi Frederik II du Danemark (1808-1863), qui l’expose alors avec le reste de sa collection d’antiquités au palais Frederiksborg, à Hillerød, au nord de Copenhague. En 1859, un incendie endommage les collections royales, mais des fragments d’un des deux objets sont sauvés des flammes. Un exemplaire est reconstitué et offert à l’empereur Napoléon III, au moment où ce dernier projette la création d’un musée des antiquités celtiques et gallo-romaines, le futur musée d’Archéologie nationale.
Le premier objet de ce type avait été découvert en 1797, dans le marais de Brudevælte, au Danemark. Le fermier Ole Pertersen met alors au jour six tubes courbes en alliage cuivreux, avant de trouver, une semaine plus tard, six embouchures. Les objets, semble-t-il, ont été soigneusement démontés et déposés dans la tourbe. D’autres pièces ont ensuite contribué ensuite à enrichir les collections des grands États européens et ces objets ont suscité un véritable engouement. Sur la place de l’hôtel de ville de Copenhague, le monument présentant deux joueurs de lur, sculpté par l’artiste S. Wagner entre 1911 et 1914, fait de cet objet un élément emblématique de la culture danoise.
LE LUR : UN OBJET EXEPTIONNEL
Un grand tube courbe et un pavillon circulaire orné de bossettes en relief composent cet objet spectaculaire daté de l’âge du Bronze, entre le VIIIe et le IXe siècle av. J.-C. Si cet instrument ressemble à une trompe, le pavillon n’est pas réellement fonctionnel. D’abord orné de motifs circulaires puis, plus tardivement, de six à dix bossettes en relief, ce dernier constitue peut-être un symbole solaire. Témoignant d’une maîtrise parfaite de la technique de la fonte du bronze à la cire perdue, l’instrument est fabriqué par coulage et soudage successif de plusieurs cylindres, emboîtés les uns dans les autres. Le cylindre inférieur est mobile, afin de faciliter la manipulation de cet objet très volumineux. L’appellation de lur, prononcé « lour », est donnée par les archéologues du XIXe siècle d’après certaines sagas islandaises (récits historiques ou légendaires en prose). La plupart des lurs sont découverts en contexte humide et marécageux, et parmi la cinquantaine d’exemplaires recensés, 31 proviennent du Danemark.
UN INSTRUMENT DE MUSIQUE MYSTERIEUX
La forme du lur s’inspire peut-être des premiers instruments fabriqués avec des cornes de bovins. Les gravures rupestres scandinaves et l’archéologie expérimentale permettent de comprendre la manière dont se jouait cet instrument de musique. Il se portait probablement à bout de bras, le pavillon situé en position haute. Nécessitant une grande puissance de souffle, les exemplaires utilisés lors des expérimentations ont produit des sons retentissants, à la tonalité étendue. Néanmoins, le pavillon de l’exemplaire conservé au musée d’Archéologie nationale n’étant pas fonctionnel, peut-être n’avait-il alors qu’une fonction symbolique. Peut-être cet instrument accompagnait les guerriers scandinaves au combat, ou pour certains, accompagné d’autres instruments rythmiques, permettait d’accéder à un état de transe. Les gravures rupestres suédoises, qui datent de la même époque, montrent des joueurs de lur accompagnant un cortège funèbre ou religieux. Étant donnée leur rareté, ils sont sans aucun doute des objets de prestige.
BIBLIOGRAPHIE
LORRE, Christine. Aux sources de la musique scandinave de l’âge du Bronze : le lur danois. In : Archéologia, mai 2017, n°554, p. 24-25.
LIENS UTILES
Fiche rédigée par Christine Lorre et Audrey Lopes
Alliage cuivreux
Blidstrup (Danemark)
VIIIe-IXe siècles av. J.-C.
L. 107 cm
ACQUISITION
Collection de Frederik VII du Danemark, don à Napoléon III en 1862