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Bandeau en nuances de gris

Dépôt funéraire d'un d'officier romain

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© GPRMN/MAN/Hervé Lewandowski
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© MAN/Loïc Hamon
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© GPRMN/MAN/Hervé Lewandowski
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Cette riche tombe associe, autour de l’urne contenant les restes du défunt, une partie de l’équipement militaire d’un soldat romain ainsi que des objets hétéroclites.

UNE DÉCOUVERTE FORTUITE DANS UN CHAMP

C’est en labourant son champ que M. Michaud fait, en 1874, une étrange découverte… Le soc de sa charrue ayant heurté un grand vase en terre-cuite, il entreprend d’en explorer l’intérieur. Les os incinérés se trouvent dans une patère - un récipient à manche - avec les objets personnels du défunt, particulièrement nombreux :

  • Une épée en fer avec un fourreau
  • Un casque
  • Une cotte de mailles
  • Un bassin en tôle de bronze
  • Une pointe de flèche en fer
  • Les éléments d’un ceinturon et notamment une boucle
  • Un torque en bronze
  • Un flacon en bronze
  • Une coupe en bronze
  • Deux strigiles
  • Une boîte en os
  • Un style (?) en bronze
  • Quatre coins monétaires en fer, trois monnaies
  • Des outils en fer et en silex
  • Un coquillage

Par la suite, l’exploration de l’environnement de cette tombe a permis de mettre au jour d’autres objets provenant vraisemblablement d’une nécropole dont l’organisation et la chronologie demeurent cependant inconnues. Acquis par l’entremise de Joseph Déchelette (1862-1914), l’ensemble du mobilier funéraire entre en 1904 dans les collections du musée des Antiquités nationales.

UN RARE TÉMOIN DE L'ÉQUIPEMENT D'UN SOLDAT ROMAIN DE LA PREMIÈRE MOITIÉ DU Ier SIÈCLE

Les découvertes d’équipement militaire romain sont peu fréquentes, celui-ci revenant en principe à l’armée. Le glaive, arme par excellence du légionnaire, n’est que partiellement conservé. Seule la pointe a résisté à la corrosion. L’entrée du fourreau, en bronze, se distingue par son décor végétal qui confirme l’attribution de l’arme au type Mayence. Cette épée courte - 50 à 60 cm de longueur en moyenne - est particulièrement meurtrière dans le combat au corps à corps. Bien que le casque soit partiellement conservé, la visière à visage humain est caractéristique d’un type apparaissant sous le règne de l’empereur Auguste (- 27 av. J.-C. – 14 ap. J.-C.). Peu adapté au combat, il s’agit vraisemblablement d’un casque de parade, comme le démontre la mention d’une couronne de lauriers disparue par la suite. Le visage modelé dans une tôle de bronze est imberbe et les traits très stylisés. Les yeux, la bouche ainsi que les narines sont percés. La cotte de mailles du défunt a été pliée avec soin pour être placée dans le casque : sept épaisseurs ont été observées. L’armure est constituée d’anneaux en fer de 4,5 mm de diamètre. Les deux attaches en forme de lyre permettent de relier entre elles les épaulières qui renforcent le vêtement au niveau des épaules.

Le ceinturon placé dans la tombe est formé d’une boucle à décor animalier et de trois plaques en bronze estampées où figure le buste de Tibère (14-37). L’empereur, dont la tête est ceinte d’un bandeau, est placé sur un globe encadré par deux cornes d’abondance. Le torque à section carrée et en bronze doré possède un diamètre de 17 cm qui permet de supposer qu’il était porté. Si cette parure typiquement gauloise devient au Ier siècle une décoration militaire romaine, elle est sans doute encore portée par les troupes d’auxiliaires gaulois. Enfin, parmi les objets personnels figurent un petit flacon à visage de femme, des coupes en bronze ayant vraisemblablement servi aux libations accompagnant les funérailles.

Une présence insolite dans une tombe : des coins pour la fabrication des monnaies

La frappe des monnaies s’effectue à l’aide de coins sur lesquels étaient gravés l’atelier - ici Lyon - et le profil des empereurs ainsi que leur titulature, en l’occurrence ceux de Tibère. L’état de conservation de ces objets en fer ne permet pas de distinguer entre l’oxydation due à leur séjour prolongé dans la terre et un éventuel martelage. Quoi qu’il en soit, on peut s’interroger sur la présence de ces coins dans une sépulture de soldat. Peut-être un indice de la fonction qu’occupait ce légionnaire ?


Notice rédigée par Thierry Dechezleprêtre

 

BIBLIOGRAPHIE

BERTRAND, Alexandre. Les découvertes romaines et gallo-romaines faites dans le département de l’Allier. Revue Bourbonnaise, 1886, p. 187-195.

CONNY de J.-A. 1873-74 : visite faite aux fouilles faites au sommet du Puy-de-Dôme et dans un champ du domaine Vivant, commune du Chassenard (Allier), le 25 septembre et le 11 octobre 1874. B.S.E.A., 13, 1873-1874, p. 494-498.

CHEW, Hélène. Masque de fer. Un officier romain au temps de Caligula. Catalogue de l’exposition du Musée des antiquités nationales de Saint-Germain-en-Laye (6 novembre 1991 - 4 février 1992). Paris : Réunion des musées nationaux, 1991, 175 p.

LIENS UTILES

https://archives.musee-archeologienationale.fr/index.php/man-91860

https://musee-archeologienationale.fr/collection/objet/joseph-dechelette